Un regard sur les inégalités de patrimoine en France
Pour cette première édition, j'ai choisi d'aborder les inégalités de patrimoine en France. C'est un sujet large, qui revient souvent dans le débat public, et il est parfois difficile d'évaluer ce que signifie être pauvre ou être riche. Qui est riche ? La personne qui possède un patrimoine de plus d'un million d'euros, ou la personne qui possède plus que 90% du reste de la population ?
Notez bien qu'ici, nous ne parlons pas des revenus, mais bien du patrimoine, et plus précisément de patrimoine net. C'est à dire, la valeur totale des actifs financiers et non financiers (logements, terrains, dépôts, obligations, actions, etc.) détenus par un individu ou une famille, moins ses dettes.
A titre indicatif, le patrimoine total des français s'élève à 18 906 Milliards d'€ (Banque de France - 2021). Si on compte 40 Millions de français actifs, le patrimoine moyen par individu est donc d'environ 470 000 €. Ce chiffre représente mal la réalité, car la moyenne est une statistique sensible aux valeurs extrêmes.
La question à se poser est :
Comment est reparti ce patrimoine ?
Jetons un oeil au graphique suivant. La population a été découpée en 100 tranches. Chacune des tranches représente 1% de la population, classée par niveau de richesse.
Les valeurs indiquées sur ce graphique sont les seuils pour passer d'une tranche à une autre. Cependant, il existe des disparités à l'intérieur même des tranches. Par exemple, pour la tranche des 1% des plus riches, la valeur seuil est 1 590 611 €, mais les 0,1% les plus riches possèdent plus de 9 366 289 € de patrimoine net. Nous pourrions subdiviser à nouveau ce dernier 0,1% en dix tranches, les écarts seraient encore colossaux. En haut de l'échelle se trouve Bernard Arnaud, avec un patrimoine fluctuant autour des 150 Milliards d'€, soit 100 000 fois plus que le seuil des 1% les plus riches.
Une autre manière d'exprimer l'écart criant entre les plus pauvres et les plus riches est de trouver le point de division de la population pour lequel la moitié du patrimoine total est détenue par une fraction de la population, et l'autre moitié par le reste. Autrement dit, combien de personnes possèdent la moitié de toute la richesse ? La réponse est ici :
La moitié du patrimoine total est detenu par 12% de la population.
Est-ce normal, est-ce juste ? La compréhension exhaustive des dynamiques de répartition du patrimoine dépasse largement le cadre de cette newsletter. Mon intention ici est plutôt d'éclairer certains aspects de ce vaste sujet en y apportant un peu d'objectivité et quelques réflexions constructives.
Les causes sous-jacentes des inégalités sont complexes, les chiffres évoqués ici font écho à une multitude de facteurs individuels, économiques, sociaux et historiques.
On peut toutefois mettre le doigt sur trois facteurs cruciaux :
1 - L'héritage et la transmission des richesses
2 - Les écarts de revenus
3 - La rémunération du capital
Le capital est la partie du patrimoine investie dans le but de produire des revenus ou des gains supplémentaires (parts d'entreprises, immobilier locatif etc.)
L'accumulation du capital favorise une augmentation des inégalités lorsqu'une minorité dispose des moyens d'investir et de récolter des rendements substantiels. Cela accentue les écarts de richesse avec ceux qui ne peuvent pas acheter leur résidence principale ou investir. Le rendement du capital contribue à une croissance plus rapide du patrimoine.
Autrement dit, plus je possède de capital, plus il est facile d'en acquérir.
Cette dynamique crée un cercle vertueux pour les détenteurs de capital mais mène à un cercle vicieux d'exclusion économique pour les autres, renforçant les inégalités patrimoniales au fil des générations.
Nous avons ici ouvert de nombreuses questions, notamment :
- Quel est l'impact réel de l'héritage sur la distribution du patrimoine ?
- Comment les écarts de revenus se transforment-ils en écarts de patrimoine ?
On pourrait aussi se demander :
- Quel est l'impact des politiques publiques sur la redistribution des richesses ?
- Est-ce que les écarts observés en France sont les mêmes dans les autres pays ?
Nous essaierons de répondre à ces questions au travers de prochaines éditions. Vous l'aurez compris, il y a de l'économie au programme, mais pas que !
Comments