Introduction à l’électromyographie (EMG) et principes fondamentaux

L’électromyographie (EMG) est une technique qui permet de mesurer l’activité électrique des muscles lorsqu’ils se contractent. Dans ce premier article d’une série consacrée à l’EMG, je présente les principes fondamentaux de cette méthode, en commençant par une introduction aux concepts clés et à la biophysique sous-jacente. Je parle ensuite de deux méthodes d’EMG couramment utilisées : les EMG de surface et les EMG intramusculaire. Pour finir j’aborde succinctement les différents types d’analyses qui peuvent être appliqués aux signaux, et des informations que l’on peut en extraire. 

Que vous soyez étudiant, professionnel, ou simplement curieux d’en savoir plus sur la manière dont on peut mesurer l’activité musculaire et explorer les liens entre les muscles et le système nerveux, l’objectif de cet article est de vous fournir une première approche pour comprendre les bases de l’EMG.

L'électromyographie en bref

L’électromyographie mesure l’activité électrique résultante de l’interaction entre le système nerveux et les fibres musculaires. Lorsque le cerveau envoie des signaux aux muscles pour se contracter, ces signaux se propagent le long des nerfs sous la forme d’une charge électrique. Ces influx atteignent les fibres musculaires et provoquent une contraction musculaire.

L’EMG permet de capter les signaux électriques associés à ces contractions musculaires. Ces signaux, appelés potentiels d’action sont captés à l’aide d’électrodes placées sur la peau ou directement à l’intérieur des muscles. Les signaux capturés sont ensuite amplifiés, filtrés et analysés pour fournir des informations sur l’état et le fonctionnement des muscles étudiés.

Cette technique est largement utilisée dans divers domaines, notamment la recherche biomédicale, la rééducation, l’évaluation de la performance sportive, le diagnostic de maladies neuromusculaires et l’ergonomie. L’EMG permet aux chercheurs, aux cliniciens et aux professionnels de santé de mieux comprendre le fonctionnement des muscles, d’identifier des dysfonctionnements et de concevoir des stratégies pour optimiser les performances et la rééducation.

Biophysique de l'EMG​

Processus de contraction musculaire, potentiels d'action et jonctions neuromusculaires

Pour bien saisir les fondements de l’électromyographie, il est essentiel de comprendre le mécanisme de la contraction musculaire. La contraction musculaire est un processus complexe qui implique la transmission de signaux électriques le long des neurones moteurs et des fibres musculaires, ainsi que des interactions biochimiques au niveau des jonctions neuromusculaires. Voyons plus en detail ce qu’il se passe à chacune de ces étapes :

Copie de La contraction musculaire (1)

Qu'est-ce qu'on mesure exactement ?

On a bien compris que les signaux EMG reflètent l’activité électrique des muscles, mais qu’est-ce qui est réellement mesuré et comment est-ce lié au fonctionnement des muscles?

Les unités motrices : un élément clé pour comprendre l'EMG

Une unité motrice est composée d’un seul motoneurone (neurone moteur) et de l’ensemble des fibres musculaires qu’il innerve. Les unités motrices sont les plus petites composantes fonctionnelles du système neuromusculaire capables de produire une contraction musculaire. Elles jouent un rôle crucial dans la génération de la force musculaire et la coordination des mouvements.

La solicitation des unités motrices

Le recrutement et la fréquence de décharge des unités motrices sont les principaux mécanismes par lesquels le système nerveux contrôle la force et la coordination musculaires. Le recrutement fait référence au nombre d’unités motrices activées pour produire une force musculaire donnée. Plus le nombre d’unités motrices recrutées est élevé, plus la force musculaire est importante. La fréquence de décharge, quant à elle, fait référence à la fréquence à laquelle les potentiels d’action sont générés dans les motoneurones. Une fréquence de décharge plus élevée entraîne une contraction musculaire plus rapide et plus forte.

Les unités motrices et l'EMG

L’EMG mesure les potentiels d’action des fibres musculaires individuelles qui composent les unités motrices. En analysant les signaux EMG, on peut obtenir des informations précieuses sur le recrutement et la fréquence de décharge des unités motrices, ainsi que sur la synchronisation et la coordination des contractions musculaires. 

Cependant, ce que l’on mesure dépendra de la méthode utilisée et du niveau d’analyse choisi. Selon si on mesure l’activité globale d’un muscle ou si l’on se concentre sur des fibres musculaires spécifiques, les informations recueillies ne seront pas les mêmes et ne seront pas representative des mêmes phénomènes sous-jacents. 

Deux techniques courantes d'électromyographie

Électromyographie de surface (sEMG)

L’électromyographie de surface, ou sEMG, est une technique non invasive permettant de mesurer l’activité électrique des muscles à travers la peau. Cette méthode utilise des électrodes de surface qui sont placées sur la peau, directement au-dessus du muscle d’intérêt. L’électrode capte les signaux électriques qui déclenchent la contraction des fibres musculaires sous-jacentes. 

Non invasive : L’un des principaux avantages de la sEMG est qu’elle est non invasive, ce qui signifie qu’aucune aiguille ou autre instrument n’est inséré dans le muscle pour mesurer l’activité électrique. Cela la rend plus confortable pour le sujet et réduit le risque d’infection ou de complications.

Facilité d’utilisation : La sEMG est relativement simple à mettre en place et à utiliser. Les électrodes peuvent être facilement appliquées sur la peau, sans besoin de formation spécialisée. Il est important, cependant, de bien préparer la zone de la peau où les électrodes seront placées (en la nettoyant et en enlevant les poils, par exemple) pour garantir une bonne adhérence et une qualité de signal optimale.

Moins précise pour les muscles profonds : La sEMG est particulièrement adaptée pour mesurer l’activité des muscles superficiels, c’est-à-dire ceux qui sont proches de la surface de la peau. Pour les muscles plus profonds, la sEMG peut être moins précise, car les signaux électriques doivent traverser des couches supplémentaires de tissus pour atteindre les électrodes.

Sensibilité aux artefacts : La sEMG peut être sensible aux artefacts, c’est-à-dire des signaux indésirables qui peuvent interférer avec les signaux EMG d’intérêt. Les artefacts peuvent provenir de diverses sources, telles que les mouvements de la peau, la transpiration, les interférences électromagnétiques ou les contractions d’autres muscles adjacents. Des techniques de traitement du signal, telles que le filtrage et la décomposition des signaux, peuvent être utilisées pour atténuer l’impact des artefacts sur les mesures EMG.

L’électromyographie de surface est une méthode largement utilisée pour mesurer l’activité musculaire en raison de sa facilité d’utilisation et de son caractère non invasif. Elle est particulièrement utile pour les études en neurophysiologie, la rééducation fonctionnelle, l’évaluation ergonomique et l’analyse biomécanique.

Électromyographie intramusculaire (iEMG)

L’électromyographie intramusculaire, ou iEMG, est une technique invasive qui mesure l’activité électrique des muscles en insérant directement des électrodes fines (aiguilles ou fils) dans le muscle d’intérêt. Cette méthode permet d’obtenir des informations plus détaillées sur l’activité des fibres musculaires individuelles et est particulièrement utile pour l’étude des muscles profonds ou de petits groupes de fibres musculaires. 

Invasive : Contrairement à la sEMG, l’iEMG est une technique invasive qui nécessite l’insertion d’électrodes dans le muscle. Cette méthode peut être plus inconfortable pour le sujet et nécessite d’être réalisée par un professionnel qualifié.

Nécessite une formation spécialisée : La mise en place et l’utilisation de l’iEMG nécessite une formation spécialisée et une expérience pratique, car l’insertion des aiguilles ou des fils doit être réalisée avec précision pour éviter les blessures et obtenir des mesures fiables.

Précision accrue pour les muscles profonds : L’un des principaux avantages de l’iEMG est sa capacité à mesurer l’activité des muscles profonds avec une précision accrue par rapport à la sEMG. En insérant directement les électrodes dans le muscle, l’iEMG permet de capter les signaux électriques directement à la source, sans qu’ils traversent plusieurs couches de tissus.

Moins sensible aux artefacts : L’iEMG est généralement moins sensible aux artefacts que la sEMG, car les signaux électriques sont captés directement à l’intérieur du muscle. Cela permet d’obtenir des mesures plus précises et de minimiser l’impact des interférences externes.

L’électromyographie intramusculaire est une méthode précieuse pour étudier l’activité musculaire en détail, en particulier dans les cas où la sEMG pourrait ne pas fournir des informations suffisamment précises. L’iEMG est plus largement utilisée dans la recherche et les diagnostics médicaux. Malgré son caractère invasif, l’iEMG offre des avantages uniques en termes de précision et de résolution des signaux, ce qui en fait un outil clé dans l’analyse des pathologies musculaires, l’évaluation des troubles neuromusculaires et la compréhension des mécanismes sous-jacents à la contraction musculaire.

Les informations contenues dans les signaux EMG

Pour extraire des informations contenues dans les signaux EMG, trois types d’analyse sont possibles : 1) l’analyse de l’amplitude, 2) l’analyse temporelle, et 3) l’analyse fréquentielle. Chacune de ces analyses fournit des informations différentes sur la fonction musculaire et peut se compléter pour donner une compréhension globale de l’activité musculaire. Voyons plus en detail les informations que l’on peut extraire avec ces analyses.

Analyse de l'amplitude

L’analyse d’amplitude s’intéresse à la magnitude du signal EMG, qui est en corrélation avec le nombre d’unités motrices, de fibres musculaires activées et le niveau de force musculaire générée. Cette approche est couramment utilisée pour évaluer la force musculaire, les schémas d’activation musculaire et détecter les déséquilibres musculaires. L’analyse des amplitudes peut être appliquée aussi bien aux signaux sEMG qu’aux signaux iEMG.

Analyse temporelle

L’analyse temporelle examine le domaine temporel du signal EMG, en se concentrant notamment sur les moments d’activation et de désactivation de la contraction musculaire. Pour les signaux sEMG, l‘analyse temporelle consiste à étudier les variations du signal au cours du temps, permettant ainsi d’identifier les schémas d’activation musculaire et d’évaluer la coordination entre différents groupes musculaires. Pour les signaux iEMG, elle fait plutôt référence à l’examen des potentiels d’action musculaires individuels, leur durée et leurs intervalles, offrant une perspective plus détaillée sur le recrutement des fibres musculaires et les mécanismes d’activation musculaire.

Analyse fréquentielle

L’analyse fréquentielle implique l’examen du contenu fréquentiel du signal EMG, qui reflète divers aspects de la contraction musculaire, tels que le type de fibres musculaires, la vitesse de contraction et la fatigue. En analysant les différentes composantes fréquentielles du signal EMG, il est possible d’obtenir des informations sur l’endurance, la force et la puissance musculaire, ainsi que détecter les premiers signes de fatigue ou d’autres changements fonctionnels. Ces informations seront représentatives de l’activité globale des fibres musculaires sous la surface de la peau pour les signaux sEMG, tandis qu’elles refléteront les mécanismes de contraction et de relaxation des fibres musculaires individuelles pour les signaux iEMG.

Pour chacune de ces méthodes d’analyse – amplitude, temporelle et fréquentielle –, des techniques de traitement des signaux et des indicateurs spécifiques existent et sont largement documentés dans la littérature scientifique. Ces indicateurs permettent d’extraire des informations détaillées et quantitatives sur l’activité musculaire, facilitant ainsi la compréhension des mécanismes sous-jacents et la mise en place de stratégies d’intervention adaptées. Mais je reserve ces details pour d’autres articles !

Voilà pour ce rapide tour d’horizon de la contraction musculaire et des méthodes de mesure. Merci de m’avoir lu. Si cet article vous a plu et vous a été utile, n’hésitez pas à me le faire savoir. N’hésitez pas non plus si vous avez des questions, des remarques ou des suggestions pour approfondir un point en particulier. 

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